A Dieu Père Jean Richard

Accueil de Marie Guérineau, Coordinatrice de la paroisse Saint-Jacques-en-Gâtine
au nom de la communauté paroissiale et diocésaine
Jean, nous t’accueillons dans cette église de Thénezay dans laquelle tu célèbres régulièrement depuis ton arrivée ici en août 1999.

Tu es né à Sommières-du-Clain, le 27 mai 1942, dans une famille d’agriculteurs. D’une fratrie de 4 enfants, tu étais le dernier avec ton frère jumeau, Michel.

En grandissant, tu as répondu, à ton heure, à l’appel du Seigneur. Pour se faire connaître, pour se faire aimer, tu pressentais que Dieu avait besoin de toi. Alors, la trentaine passée, tu as commencé un long parcours de formation en entrant au séminaire d’aînés à Gauriac (Gironde), et à l’âge de 37 ans, en juin 1979, tu as été ordonné prêtre à Pleumartin.

Tu fus nommé à l’équipe pastorale de Pleumartin, puis au doyenné de Montmorillon. Tu as rejoint ensuite le secteur du Mélusin, en résidence à Jazeneuil. En 1999, tu es arrivé à Thénezay comme responsable du secteur pastoral. Lors de la création des paroisses en 2014, tu as reçu la mission de prêtre coopérateur, puis d’auxiliaire, à la paroisse Saint-Jacques-en-Gâtine.

Jean, toi l’homme de la terre, dès ta plus tendre enfance, suite à une maladie, il t’a fallu surmonter ton handicap : cette jambe qui devait suivre l’autre … Qu’à cela ne tienne, tu puisais dans les réserves physiques, et sans jamais te plaindre, tu avançais, tu marchais, tu montais les escaliers qui te conduisaient à l’autel !

Comment faire aimer le Christ ? En aimant les gens tout simplement, en vivant comme eux, à hauteur d’homme, avec une option préférentielle pour les petits, les pauvres.

Partout où tu es passé, tu répondais présent, non seulement dans le service eucharistique, mais aussi pour accompagner les familles dans la joie comme dans le deuil. On pouvait compter sur toi. Tu participais aux rencontres diocésaines et aux réunions de la Paroisse, mais aussi à la vie locale et particulièrement à la chorale puisque tu as toujours beaucoup aimé chanter.

Mardi dernier, tu étais présent avec nous, joyeux et même blagueur, à la rencontre de l’équipe pastorale puis du conseil pastoral de la paroisse. Jeudi, avec les prêtres de la Paroisse, vous aviez célébré puis déjeuné ensemble. Tu avais aussi reçu deux familles pour préparer le baptême de leurs enfants. Tu as ensuite répondu à l’invitation à l’assemblée générale de l’ADMR et tu as partagé le dîner avec les 200 personnes présentes. C’est peu après, dans la soirée, que tu nous as quittés, présent jusqu’au bout auprès des habitants, chrétiens ou non.

Jean, tu as fait de ton mieux pour être fidèle jusqu’au bout. Nous croyons qu’aujourd’hui tu es dans la Joie, après du Seigneur. Dans ton testament, tu nous as demandé d’être, nous aussi, dans la Joie, en ce jour d’À Dieu.

Thierry, son neveu, dépose la croix sur le cercueil.

Christophe recueille la lumière au cierge pascal.

Pierre Duclos, diacre, et Gérard Mouchard, prêtre, déposent l’aube et l’étole de Jean sur le cercueil

Une assemblée nombreuse et recueillie.
Homélie du Père Gérard Mouchard, Curé de la paroisse
Jean, notre compagnonnage a commencé il y a 54 ans. En septembre 1969, tu rentrais au séminaire d’aînés de Gauriac en Gironde, moi un an auparavant, le séminaire des attardés comme tu aimais le dire avec malice. Tu avais 28 ans. Tu étais le plus âgé d’entre-nous, ce qui permettait à quelques-uns, beaucoup plus jeunes, de t’appeler « papy ».Tu prenais cela avec humour et même comme une marque d’affection.
Tu aimais dire aussi, de façon familière, que le Seigneur est venu te chercher, t’appeler au « cul des vaches ». Il est venu te chercher au plein milieu des champs, quand tu soignais les bêtes, dans ta vie toute simple de tous les jours. « Je ne suis pas un grand intellectuel, disais-tu, mais çà ne m’empêche pas de servir le Christ ». Le Seigneur est venu te chercher comme il est venu à la rencontre des disciples d’Emmaüs, le soir de Pâques, sur leur chemin, au plus profond de leurs interrogations. Ils venaient de faire une expérience formidable avec Jésus et les autres disciples et voici que tout s’arrête. Leur belle aventure est terminée, il n’y a plus qu’à rentrer chez soi et à tout effacer.

Mais le Ressuscité les rejoint dans leur cheminement et leur explique les Écritures, c’est-à-dire qu’il vient leur révéler le sens de ce qu’ils viennent de vivre là-bas à Jérusalem. Eux qui sont comme des aveugles, ne comprenant rien à ce qui leur est arrivé, ils vont peu à peu trouver la lumière et marcher plus avant. Jean, c’est le Christ, le Ressuscité qui est venu te rejoindre, te révéler ta vocation et réorienter le cours de ta vie. Dans ton testament, tu as écrit, pour la célébration de mes obsèques, je veux « que soit rappelé l’importance de l’appel que le Seigneur fait à chaque baptisé et plus spécialement à certains pour un ministère dans l’Église comme prêtres, diacres ou ministères reconnus mais également religieux, religieuses et moniales. » Jean, tu as répondu à cet appel, toi qui te considérais petit parmi les petits.

Et puis le soir tombant, il a fallu s’arrêter dans une auberge pour dîner et reprendre des forces. Jésus fait semblant d’aller plus loin mais les disciples le retiennent. Et c’est là, au cours du repas que tout s’illumine pour eux. Jésus fait les gestes de l’eucharistie, il rompt le pain et le leur donne. C’est alors qu’il disparaît à leurs regards. Ces gestes de Jésus sont parvenus jusqu’à nous, nous les faisons à chaque messe. Ils nous rappellent sa vie donnée jusqu’au bout pour nous sauver du mal et de la mort. Jean, tu aimais faire ces gestes. L’eucharistie avait une place centrale dans ta vie de chrétien et de prêtre. Même si l’assemblée était peu nombreuse, tu disais l’importance que tous puissent avoir part à ce sacrement qui nourrit et régénère. Tu aimais présider les assemblées et célébrer trois eucharisties du samedi soir au dimanche ne te faisait pas peur avec tous les kilomètres qui allaient avec. Tu y tenais pour que le plus grand nombre puisse bénéficier de la grâce du sacrement.

Jésus disparaît à leurs regards. Il laisse les deux disciples libres de faire part de leur expérience aux autres, de devenir des apôtres, des missionnaires de l’Évangile. C’est à eux maintenant d’agir. «Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures?» Ce qu’ils viennent de vivre est tellement fort qu’ils ne peuvent pas garder rien que pour eux cette bonne nouvelle de la rencontre avec le Ressuscité. Ils rebroussent chemin et retournent à Jérusalem raconter aux autres disciples, réunis en ce soir de Pâques, ce qui s’est passé sur la route et comment le Seigneur s’est fait reconnaître par eux à la fraction du pain. Jean, toi aussi tu as fais l’expérience de cette rencontre et tu es devenu prêtre pour annoncer l’Évangile à tous. Tu le faisais à ta manière en étant proche des gens, en les écoutant, attentif à leurs préoccupations. Tu disais qu’il faut prendre les gens comme ils sont et cheminer avec eux tout simplement. Cette mission, tu la partageais avec d’autres, tu n’étais pas tout seul. Parfois la collaboration avec toi n’était pas toujours facile, tu étais un peu « ronchon » lorsque les choses ne te plaisaient pas, surtout Internet. Tu ne comprenais pas comment nous pouvions dépendre autant de cet outil. Tu pouvais ne pas être agréable parfois… Tu savais cela, tu le regrettais et tu essayais de te corriger. Mais on ne t’en voulait pas. Nous savions que ton handicap y était certainement pour quelque-chose. Tu étais courageux, tu ne te plaignais jamais.

Nous te devons un grand merci, Jean. Merci pour ce que tu étais, merci pour ta disponibilité. Tu vas beaucoup nous manquer. Tu avais une place importante dans notre paroisse Saint-Jacques-en-Gâtine que tu as contribué à organiser puisque tu étais là avant même sa fondation, tu en connaissais l’histoire. Tu voulais mourir à la tâche, tu as été exaucé mais bien trop tôt. Merci Jean, que le Christ qui était ton compagnon de route t’accueille dans le monde nouveau de Dieu.

L’offertoire
Témoignage de la famille par Thierry
Lecture par Bernard d’un texte que Jean avait gardé sur son bureau
NOUS SOMMES TOUS DES OUVRIERS
(Méditation de Mgr Oscar Romero)

« Il est bon parfois de prendre du recul et de regarder derrière soi.
Le royaume de Dieu n’est pas seulement au-delà de nos efforts,
il est aussi au-delà de notre vue.

Durant notre vie, nous n’accomplissons qu’une petite part
de l’entreprise magnifique qu’est le travail de Dieu.
Rien de ce que nous faisons n’est achevé.
Le Royaume est toujours au-delà de nos possibilités.
Aucune déclaration ne dit tout de ce qui peut être fait.
Aucune prière n’exprime complètement notre foi.
Aucune religion n’apporte la perfection.
Aucune visite pastorale n’apporte la plénitude.
Aucun programme n’accomplit la mission de l’Église.
Aucun ensemble de buts et d’objectifs ne peut être complet.

C’est ainsi que nous sommes.
Nous plantons des graines qui un jour pousseront.
Nous arrosons des graines glanées, sachant qu’elles portent en elles la promesse du futur.
Nous posons des fondements qui devront être élevés.
Nous fournissons le levain qui produira des effets bien au-dessus de nos capacités.
Nous ne pouvons tout faire, et le comprendre nous apporte un sentiment de libération.
Cela nous permet de faire quelque chose et de le faire bien.
Ce n’est peut-être pas fini mais c’est déjà un début. Un pas de plus sur le chemin.
Une opportunité de laisser entrer la grâce du Seigneur qui fera le reste.
Nous pouvons ne jamais voir les résultats finaux,
mais c’est là la différence entre le maître et l’ouvrier.

Nous sommes des ouvriers, pas des maîtres artisans, des ministres, pas des messies.
Nous sommes les prophètes d’un futur qui ne nous appartient pas.

Rites de l’encens et de l’eau par Mgr Pascal Wintzer.
Recueillement de l’équipe pastorale autour du cercueil de Jean.
Photos : Michel Bonnessée

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